Perturbateurs endocriniens : comprendre leurs effets sur la santé

Présents dans notre environnement quotidien, les perturbateurs endocriniens peuvent interagir avec notre système hormonal. Comprendre leur rôle, leurs sources et les bons réflexes pour limiter l’exposition est essentiel. Découvrez dans cet article, l’essentiel de ce qu’il faut savoir sur les perturbateurs endocriniens !

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Qu’est-ce qu’un perturbateur endocrinien ?

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), un perturbateur endocrinien est une substance « susceptible d’altérer le fonctionnement du système hormonal et d’entraîner des effets néfastes sur la santé d’un organisme, de sa descendance ou de populations entières ».

Plus simplement, cela signifie qu’il s’agit d’un composé capable de perturber la manière dont nos hormones communiquent. Pour mieux visualiser, imaginez que vos hormones soient de petits messagers qui transportent des ordres précis dans tout votre corps pour qu’il puisse fonctionner correctement. Un perturbateur endocrinien, c’est comme une fausse lettre ou un faux facteur qui se trompe de boîte aux lettres, bloque le passage ou brouille le message. Résultat : certaines instructions du corps peuvent être mal comprises, ce qui dérègle des fonctions essentielles comme la croissance, l’énergie ou la reproduction.

Le rôle clé du système hormonal

Le système hormonal (ou endocrinien) fonctionne comme une grande régie d’orchestre : il coordonne la croissance, la reproduction, la régulation du poids, du sommeil, du stress et même de l’humeur. Ses principaux chefs d’orchestre sont les hormones, produites par des glandes comme la thyroïde, les ovaires, les testicules ou le pancréas.

Ces hormones circulent dans le sang pour transmettre des messages aux organes. Lorsqu’une substance étrangère imite ou bloque ces messages, c’est tout l’équilibre du corps qui peut se trouver désynchronisé.

Ce que dit la réglementation

Le sujet des perturbateurs endocriniens n’est pas nouveau. 

D’après l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES), les perturbateurs endocriniens font l’objet d’un suivi renforcé au sein de l’Union européenne. Ils sont encadrés par deux textes majeurs :

  • REACH : qui réglemente l’enregistrement et l’évaluation des substances chimiques

  • Le règlement CLP : qui régit la classification et l’étiquetage des produits dangereux.

La France, quant à elle, a mis en place une Stratégie Nationale sur les Perturbateurs Endocriniens (SNPE). Cette démarche vise à identifier les substances préoccupantes, mieux informer les consommateurs et encourager les alternatives naturelles. Cela ne signifie pas que toutes les substances sont interdites : certaines sont encore à l’étude, et seules celles dont les effets ont été clairement démontrés sont aujourd’hui restreintes.

Les différents types

On distingue deux grandes catégories de perturbateurs endocriniens. Les naturels, comme les phytoestrogènes présents dans le soja ou le lin, imitent faiblement certaines hormones sans danger connu aux doses alimentaires habituelles. Leur action est douce et passagère. Les synthétiques, issus de l’industrie chimique, sont utilisés dans certains plastiques, pesticides ou cosmétiques conventionnels. Plus persistants, ils peuvent s’accumuler dans l’environnement et l’organisme, ce qui explique leur surveillance et leur encadrement croissant par les autorités sanitaires.

Comment agissent-ils ?

Les perturbateurs endocriniens interfèrent avec le système hormonal en modifiant la manière dont les hormones naturelles envoient leurs messages dans le corps. Ils peuvent imiter, bloquer ou altérer l’action hormonale, entraînant des dérèglements plus ou moins visibles selon la dose, la durée d’exposition et la période de la vie.

Voici les principaux modes d’action identifiés par la recherche :

Mimétisme hormonal : Quand une substance agit comme une hormone

Certaines molécules imitent les hormones naturelles et se fixent sur leurs récepteurs, envoyant un faux signal au corps. C’est le cas du bisphénol A, qui agit comme un œstrogène de synthèse et peut perturber la régulation hormonale, selon la dose et la sensibilité de l’organisme.

Blocage des récepteurs : Quand le signal hormonal est interrompu

D’autres substances se lient aux récepteurs sans les activer, bloquant ainsi les hormones naturelles. Ce mécanisme peut désorganiser la communication hormonale et affecter des fonctions comme la fertilité, le métabolisme ou l’équilibre thyroïdien.

Altération de la synthèse, du transport ou de la dégradation hormonale

Certains perturbateurs endocriniens ne copient pas les hormones mais modifient leur production, leur transport ou leur élimination. Ces déséquilibres peuvent perturber la concentration hormonale normale et, à long terme, altérer le bon fonctionnement du système endocrinien.

Effet cocktail : L’importance des expositions multiples

Dans la vie quotidienne, nous sommes exposés à de nombreuses substances à la fois, dont les effets peuvent s’additionner ou se renforcer, même à faibles doses. Ce “cocktail chimique” complique l’évaluation des risques, d’où la nécessité de réduire l’ensemble des sources d’exposition plutôt que de cibler une seule molécule.

Une sensibilité exacerbée à certains moments de la vie

Le système hormonal est plus vulnérable pendant la grossesse, l’enfance et la puberté, périodes où il régule la croissance et le développement. Même à faibles doses, une exposition peut avoir plus d’impact, ce qui justifie le principe de précaution appliqué aux femmes enceintes, aux enfants et aux nourrissons.

Effets potentiels sur la santé

Selon les conclusions de l’Endocrine Society et de l’Organisation mondiale de la santé, ces substances présentent des effets suspectés ou documentés sur plusieurs grands systèmes physiologiques.

Il est important de rappeler que les recherches se poursuivent et que, même si les liens de causalité ne sont pas toujours pleinement établis, les autorités sanitaires s’accordent sur la nécessité de réduire autant que possible l’exposition à ces composés.

Reproduction et fertilité

La reproduction est l’un des domaines les plus étudiés dans les recherches sur les perturbateurs endocriniens. Certains composés, comme les phtalates ou le bisphénol A, peuvent interférer avec la production et l’action des hormones sexuelles (œstrogènes, testostérone, progestérone). Ces déséquilibres hormonaux peuvent, selon les études, influencer la qualité du sperme, la maturation des ovules ou le bon déroulement du cycle hormonal.

L’exposition pendant la grossesse ou la petite enfance semble particulièrement déterminante : c’est une période où le système hormonal en formation est plus vulnérable. Les observations faites chez l’animal et dans certaines études humaines indiquent que ces expositions précoces pourraient altérer durablement la fonction reproductive à l’âge adulte.

Les autorités sanitaires considèrent aujourd’hui la fertilité comme un indicateur clé de l’exposition aux perturbateurs endocriniens, et encouragent une vigilance accrue sur les produits destinés aux femmes enceintes et aux jeunes enfants.

Développement et croissance

Les hormones jouent un rôle essentiel dans la croissance et la formation des organes dès la vie fœtale. Certaines substances capables de les imiter ou de les bloquer peuvent perturber ces étapes clés. Les études mettent en avant une vigilance particulière pendant la grossesse et l’enfance, périodes dites de “fenêtres de sensibilité”.

Métabolisme et régulation du poids

Certains composés, comme le bisphénol A ou certains pesticides, sont qualifiés d’obésogènes car ils peuvent influencer la façon dont le corps stocke ou dépense l’énergie. Ces effets, encore à l’étude, pourraient contribuer à des troubles du métabolisme, notamment dans un contexte d’exposition répétée.

Système thyroïdien

Certaines substances peuvent perturber la production ou l’action des hormones thyroïdiennes, essentielles à la croissance et au développement cérébral. Ces effets sont particulièrement surveillés pendant la grossesse, période où la thyroïde joue un rôle clé dans la maturation du fœtus.

Système nerveux et développement cérébral

Les hormones régulent aussi le développement du cerveau. Certaines expositions à des perturbateurs hormonaux, notamment pendant la grossesse, pourraient influencer la mémoire, la concentration ou le comportement. Ces effets restent à préciser, mais justifient l’application du principe de précaution dès les premières phases de la vie.

Même si certains liens directs dans les points évoqués dans ces différentes parties restent à confirmer, la possibilité d’effets ne peut être écartée, surtout en cas d’exposition précoce. Il est donc important de s'exposer à ses substances le moins possible.

Où les trouve-t-on ?

Les perturbateurs endocriniens se retrouvent dans de nombreux environnements :

Les perturbateurs endocriniens sont présents dans de nombreux produits et environnements du quotidien. Le tableau ci-dessous synthétise leurs principales sources d’exposition, les substances concernées et les gestes à adopter pour les limiter.

Source d’exposition

Exemples de substances concernées

Dans quels types de produits on les trouve ?

Gestes et alternatives recommandées

Cosmétiques et produits d’hygiène

Triclosan, Phtalates

Soins du visage et du corps, déodorants, crèmes solaires, maquillages conventionnels

Lire la liste INCI et éviter ces ingrédients

- Choisir des produits labellisés bio ou naturels

- Nous excluons ces substances de ses formules et privilégie les alternatives végétales

Plastiques et emballages

Bisphénol A (BPA), bisphénol S (BPS), phtalates

Bouteilles plastiques, films alimentaires, boîtes de conserve, revêtements intérieurs

- Privilégier le verre, l’inox ou le carton recyclé

- Ne pas chauffer d’aliments dans des contenants plastiques

- Éviter les plastiques abîmés ou anciens

Alimentation

Résidus de pesticides, additifs, substances migrantes (phtalates, bisphénols)

Fruits et légumes non biologiques, aliments transformés, plats préparés, contenants plastiques ou métalliques

- Consommer des produits frais 

- Préférer les circuits courts et le fait maison

- Conserver les aliments dans des bocaux en verre

Air intérieur et environnement domestique

Retardateurs de flamme (PBDE), solvants, composés organiques volatils, plastifiants

Mobilier, peintures, textiles traités, produits ménagers, poussières

- Aérer les pièces 10 min matin et soir

- Choisir des meubles non traités et des produits ménagers naturels

- Passer régulièrement l’aspirateur pour éliminer les poussières

Textiles et produits de consommation

Alkylphénols, formaldéhyde, composés perfluorés (PFAS)

Vêtements traités, textiles imperméables, moquettes, emballages anti-graisse

- Laver les vêtements neufs avant de les porter

- Privilégier le coton bio et les tissus non traités

- Éviter les produits “anti-taches” ou “imperméables”

Produits d’entretien et désodorisants

Phtalates (agents fixateurs de parfum), muscs synthétiques, solvants

Désodorisants, sprays parfumés, nettoyants ménagers conventionnels

- Utiliser du vinaigre blanc, du bicarbonate ou du savon noir

- Aérer après le nettoyage

- Éviter les parfums d’ambiance synthétiques


Précautions

Limiter son exposition aux perturbateurs endocriniens repose sur quelques gestes essentiels.

Choisissez des cosmétiques labellisés et à formule courte. Ne chauffez pas vos aliments dans du plastique, aérez quotidiennement votre intérieur et lisez toujours les listes INCI avant d’acheter un produit.

Les femmes enceintes, allaitantes et les enfants en développement doivent éviter totalement l’exposition à ces substances, leur système hormonal étant particulièrement sensible.

Avant toute utilisation d’un nouveau produit, réalisez un test cutané 48 h à l’avance et respectez les dosages recommandés. Ces précautions simples permettent de protéger durablement l’équilibre hormonal et d’adopter une routine plus sûre et naturelle.

Conseil de l’expert

Adopter une routine sans perturbateurs endocriniens, c’est avant tout revenir à l’essentiel : Prenez le temps de comprendre les compositions en vous familiarisant avec les listes INCI, un réflexe précieux pour repérer les ingrédients à éviter.

En savoir plus

Quels aliments sont concernés ?

Les aliments issus de l’agriculture conventionnelle peuvent contenir des résidus de pesticides, tout comme ceux emballés ou chauffés dans du plastique. Pour limiter l’exposition, privilégiez les produits biologiques et frais, et utilisez des contenants en verre ou en inox.

Quels sont les 7 perturbateurs endocriniens les plus fréquents ?

Selon l’OMS et l’ANSES, les plus courants sont le bisphénol A, les phtalates, les parabènes, les alkylphénols, les pesticides organochlorés, les PFAS et les retardateurs de flamme bromés. Ils sont étroitement surveillés en raison de leur présence étendue dans l’environnement.

Existe-t-il des perturbateurs endocriniens naturels ?

Oui, certains composés végétaux comme les phytoestrogènes du soja ou du lin peuvent imiter faiblement les hormones, sans danger aux doses alimentaires normales. Leur action reste modérée et transitoire, contrairement aux composés synthétiques persistants.

Zoom sur notre rédactrice spécialisée, Delphine Duc

Delphine DUC, ingénieure biologiste spécialisée en cosmétologie, le domaine de la cosmétique me passionne depuis presque 10 ans. J'ai commencé à faire mes cosmétiques maison grâce aux produits Aroma Zone pour régler mes problèmes de peau, puis j'ai décidé de me former sur le sujet en tant que cosmétologue et enfin de créer une marque de cosmétiques sur-mesure pour répondre aux problématiques de peau de chacun(e).

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