Dans les coulisses de la Spiruline de Julie

Julie revient sur la genèse du projet, au moment où Yann et elle décident d’acheter la ferme. A l’époque, ni l’un ni l’autre n’avait eu une expérience en aquaculture, et encore moins en culture de la Spiruline.

“Quand l’idée de ce projet a germé dans notre tête, nous ne savions pas grand chose de la Spiruline. Nous recherchions une alternative végétale à la viande et avions lu plusieurs livres de phytothérapie et de médecine naturelle sur le sujet. Nous avons testé, et la Spiruline nous a convaincu." nous dit Julie.

Originaire de Lille, Julie avait commencé sa carrière en tant que dessinatrice cartographe à l’IGN. Yann était plombier chauffagiste. Rien ne les prédestinait au métier de producteurs de Spiruline. Leur intérêt commun pour la nutrition et l’environnement constituait un capital de départ et c’est une formation dans un centre agricole puis un stage chez un producteur de Spiruline qui les ont fait changer de cap.  

En 2020, ils s’installent en Gironde et partent ensemble à la recherche d’un endroit pour cultiver la Spiruline. Ils sillonnent les routes de la région et tombent sur un terrain, ensauvagé alors, mais suffisamment grand pour ouvrir une exploitation. De plus, le climat et le sol argilo-calcaire des bords de la Dordogne, peu appropriés aux cultures classiques, offrent des conditions propices à la culture de la Spiruline. Ils s’y installent, rénovent la ferme et aménagent une serre de 2500m2 dans le jardin. Celle-ci donnera naissance quelques mois plus tard aux premières cultures de Spiruline.

Julie nous invite à faire le tour de l’exploitation. La serre est teintée de vert du sol au plafond, l’air y est chaud et humide, presque tropical. La Spiruline pousse par rangées dans des bassins profonds d’une vingtaine de centimètres remplis d’eau en mouvement. 

A cette époque de l’année, la production est calme. Seul un filet d’eau agite doucement les bassins et crée un léger clapotis. Au fond du bassin, les pousses sont encore toute petites. Julie nous rassure : 

“Oui, la Spiruline est entrée en période d’hibernation ! De novembre à février, lorsque la lumière est faible et les températures froides, les bassins sont laissés au repos.” 

La ferme vit donc au rythme des saisons de la Spiruline. Du mois d’avril au mois de novembre, Julie et Yann s’activent autour des bassins et veillent à une bonne agitation, un bon ombrage, des niveaux d’eau stables… La Spiruline doit ensuite être récoltée en filtrant le bain de culture, compressée puis transformée en fines spirales vertes. Elle devra par la suite être séchée et viendra enfin la mise en forme pour la distribution : poudre, comprimés.  

En écoutant Julie nous décrire les différentes étapes de production nous comprenons une chose : être Spirulinier est un métier de passion! La profession demande beaucoup de rigueur et le rythme de travail peut être intense.  

“Certains jours d’été, il nous arrive de nous lever à 5h du matin pour aller cueillir la Spiruline. C’est là que le taux de protéines est le plus élevé." 

La culture de la Spiruline répond à des exigences strictes. Comme toute autre cyanobactérie, la Spiruline pousse dans des milieux humides et tièdes. Sa croissance est optimale à une température comprise entre 35° et 37 °C, ce qui explique l’usage de serres ! De même, pour tenir la Spiruline à l’abri des insectes et des contaminations bactériennes, il est nécessaire de maintenir le ph de l’eau entre 9.5 et 10. Tout l’art du spirulinier consiste donc à reproduire un milieu de culture favorable à la croissance de la Spiruline, au plus proche du milieu naturel.

Nous continuons notre visite de la ferme. C’est dans le laboratoire attenant que sont réalisées toutes les étapes de transformation de la Spiruline : le pressage, l’essorage, le séchage et le conditionnement. Julie nous tend des brindilles de Spiruline. Nous goûtons. La saveur iodée et végétale de l’algue nous surprend. Pour Julie, la Spiruline est l’une des plus grandes merveilles sur Terre. 

“La Spiruline est une culture ancestrale appréciée pour sa valeur nutritionnelle exceptionnelle.”  

Bien qu’elle soit revenue sur le devant de la scène ces dernières années, elle n’est pas nouvelle. Elle existait déjà il y a 3,5 milliards d’années !”. Riche en vitamines, acides aminés, en magnésium et en protéines, la Spiruline est le 2ème aliment le plus riche au monde, après le lait maternel. Dans un très petit volume, elle contient une mine de nutriments. Sa teneur varie selon son origine géographique, les procédés de culture, de séchage et de broyage mais elle reste toujours très élevée : elle contient de 55 % à 70 % de protéines soit de 2,5 g à 3,5 g de protéines dans 5 g de Spiruline. De plus, elle est riche en chlorophylle et en phycocyanine, un pigment bleu naturel qui possède de fortes propriétés antioxydantes. Très nutritive, la Spiruline est appréciée des régimes végétariens car c’est une source intéressante de fer et de protéines végétales. C’est également un super-aliment utilisé pour lutter contre la malnutrition dans les pays qui souffrent de crises alimentaires. Considérée par beaucoup comme un trésor naturel, elle porte le nom “d’Or bleu”.

Si Julie et Yann se sont lancés dans la culture de la Spiruline c’est avant tout par conviction. Sensibles depuis toujours à la cause environnementale et passionnés par le bien-être et la nutrition, ils choisissent la Spiruline pour ses bienfaits pour la santé et l’environnement.  

En plus d’être considérée comme un superaliment par l’OMS, la Spiruline est une culture  vertueuse et respectueuse de l’environnement car sa production ne nécessite que très peu d’énergie et d’eau.

“La Spiruline consomme trois fois moins d’eau que le soja et cinquante fois moins que pour la viande.” 

Par ailleurs, à la ferme, Julie et Yann pratiquent un mode de culture artisanal. De l’ensemencement à la transformation, les étapes sont toutes réalisées à la main, ne nécessitant pas de matériel énergivore.Pour aller au bout de ses engagements, le couple a également choisi de s’investir dès le début de leur projet dans l’aquaculture biologique. Afin de préserver l’environnement et les écosystèmes créés dans les bassins, ils produisent une Spiruline cultivée sans produits phytosanitaires. Ici, aucun pesticides, herbicides, insecticides, fongicides ne sont tolérés ! Celle-ci ne contient pas non plus de colorants et autres conservateurs. L’engrais azoté utilisé pour nourrir la Spiruline est labellisé biologique. 

Nous parlons avec Julie de biodéchets, d’équilibre des écosystèmes, de culture cohérente et durable entre le sol, le végétal et les humains. La discussion est passionnante. Puis nous revenons au laboratoire, émerveillés par ce que nous venons de voir. Nous remercions Julie et Yann et nous nous remettons en route.